«A Idleb sous les bombes d’Assad, nous vivons au Moyen Age!»

Syrie En Suisse, deux journalistes syriens témoignent. Et insistent que la société civile est toujours là, vibrante.

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Akram Al Ahmad et sa collègue Rim Ahmed témoins d’une population civile prise au piège des frappes du régime. (Photo: Laurent Guiraud /TDG)

Pas question d’abandonner Idleb, cette province du Nord syrien qui résiste encore et toujours au régime Assad! Akram Al Ahmad est le fondateur du Syrian Press Center, l’une des rares agences de médias libres. Quant à Rim Ahmed, elle aussi journaliste, son travail porte en particulier sur le sort des femmes. Invités en Suisse par le Collectif des amis d’Alep, ils donnent une conférence ce mardi à 17 h 15 à l’Université de Lausanne (immeuble Geopolis) et ce mercredi à 18 h 30 à Genève (Uni Mail). Témoignages sans fard.

Pourquoi dites-vous que nous avons une vision biaisée de la Syrie en Occident

Akram: Vos médias donnent l’impression qu’il n’y a plus en Syrie que le régime Assad et les extrémistes religieux. En réalité, il y a toujours un mouvement civil vibrant: des journalistes, des médecins, des enseignants, des ingénieurs et des conseils locaux qui tentent de fournir des services de base aux quartiers et aux villages malgré les bombardements.

Rim: Beaucoup de femmes s’activent, dont les volontaires qui depuis le début du conflit armé soignent les blessés en cachette, dans des maisons privées…

A quoi ressemble la vie à Idlib, sous les bombes?

Akram: Le régime a coupé l’eau et l’électricité dans les régions dont il a perdu le contrôle. La livre syrienne s’est effondrée. L’inflation est galopante. Le chômage explose. Beaucoup d’usines ont fermé à cause des frappes et des champs ne sont plus cultivés par peur des munitions non-explosées. Faute de moyens, les gens changent d’alimentation. Un ami boucher vendait 400 kg de viande par jour en 2011, aujourd’hui il ne parvient plus à en écouler que 5 kg quotidiennement.

Rim: Oubliez l’eau courante, la cuisinière électrique et la machine à laver! Les mères doivent marcher jusqu’au puits le plus proche, parfois à plus d’un kilomètre, et ramener un seau plein qu’elles portent sur leur tête. Elles cultivent leur jardinet, s’il y en a un, et sortent de la ville à la recherche de fruits, de légumes, de racines… et de blé! Les boulangeries sont prises pour cible des bombardements, elles font elles-mêmes leur pain. Et bien sûr, il leur faut cueillir du bois pour faire un feu.

Akram: C’est le Moyen-Age!

La chute d’Alep a-t-elle aggravé les choses pour Idlib?

Akram: Bien sûr! Beaucoup d’Alépins sont venus se réfugier dans la région, augmentant une population déjà en crise. Et Idlib est davantage ciblé par les bombardements.

Les groupes islamistes radicaux ont servi de prétexte aux frappes du régime à Alep. Quelle est la situation à Idlib?

Akram: En réalité, le régime tue plus de civils (femmes, enfants, personnes âgées) que d’extrémistes. Nos bureaux ont été frappés, mais pas toujours les QG des groupes radicaux. Sous nos centres, il y a toujours un abri souterrain. Celui de Hama a été bombardé le mois dernier. Nous sommes menacés à la fois par le régime, par Daech et par d’autres groupes islamistes. Travailler comme journaliste est très dangereux, mais beaucoup d’étudiants viennent malgré tout se former chez nous. Et dans les zones sous contrôle du régime, nous avons des correspondants qui risquent leur vie pour faire passer l’information.

Sans électricité, comment les Syriens accèdent-ils à l’information?

Akram: Nous avons, pour chacun de nos bureaux, un générateur et des capteurs solaires. Quant à nos lecteurs, ils se connectent par téléphone mobile, un outil de survie en Syrie, qu’ils rechargent aux générateurs de quartier. Les gens sont avides d’information, ils veulent être avertis des évolutions sur le terrain. Même ceux qui vivent dans les régions contrôlées par le régime, car ils ont de la famille ou des amis en zone libérée. Sur notre site, nous avons deux millions de visiteurs par mois. Et autant d’abonnés à notre page Facebook. Beaucoup se connectent via le réseau turc.

La Cour pénale internationale est paralysée. Mais un juge à Madrid enquête sur la détention illégale, la torture et l’exécution en Syrie du frère d’une citoyenne espagnole. Est-ce important?

Akram: Cela veut dire que la justice est possible! La grande majorité des crimes sont commis par le régime. S’il n’y a plus d’impunité, peut-être certains responsables arrêteront de commettre des exactions. En tout cas, nous documentons les crimes de guerre pour aider les juges qui s’en saisiraient.

Comment voyez-vous l’avenir?

Akram: Nous sommes certains qu’à la fin, nous vivrons en démocratie comme tant d’autres pays. Nous payons le prix fort, mais un jour on y arrivera. Je vous le redis, la société civile n’est pas morte.

Source: Andrés Allemand, 28 Mars 2017 (Tribune de Genève)

Conférence avec Akram Al-Ahmad, fondateur de «Syrian Press Center »: une des premières agences de médias libres en Syrie.

Le 18 mars, à la Maison Internationale de Rennes.

« Former des journalistes c’est bâtir les bases de la Syrie démocratique initiée par la révolution ». Lire la suite

Rencontre avec deux activistes Syriens d’Alep et d’Idleb. 17 mars à Bordeaux.

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Conférence – témoignage

Suite à la reprise d’Alep-Est par le régime syrien et aux déplacements forcés de ses habitants vers les campagnes d’Alep et la province d’Idleb, il est urgent de continuer à informer l’opinion publique en France et ailleurs en Europe sur la situation dans cette région de la Syrie sous contrôle de l’opposition qui est, comme d’autres territoires plus restreints, toujours la cible de bombardements du régime et de ses alliés Lire la suite

Témoignage de Younès Shasho: humanitaire d’Alep. Le 23 mars à Marseille.

Conférence-témoignage

Amnesty International Marseille vous invite à rencontrer Younès Shasho, humanitaire syrien à Alep, le 23 mars 2017. Lire la suite

D’Alep à Idleb: la parole aux Syriens.

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En décembre 2016, le régime syrien a forcé les habitants d’Alep-Est à se déplacer vers les campagnes  d’Alep et d’Idleb sous contrôle de l’opposition au régime de Damas. Il est urgent de continuer à informer l’opinion publique en France et ailleurs en Europe sur la situation des civils dans cette région de Syrie et qui, comme d’autres territoires aux mains de l’opposition  est toujours la cible de bombardements.

A cette fin, le Collectif des Amis d’Alep entend avec différents partenaires, porter la parole de la société civile en invitant une nouvelle fois des acteurs de terrain qui ont choisi de rester sur place;  en l’absence de journalistes occidentaux , leurs témoignages sont devenus  rares et peu audibles.

Financement participatif:

https://www.lepotcommun.fr/pot/469cnjhx

Programme des événements:

METZ, 14 mars à 18H00 à l’Arsenal: Conférence-témoignage avec Akram Al-Ahmad et Rim Ahmad.

PARIS, 15 mars à 19H00 à l’Institut du Monde Arabe: intervention de Younès Shasho et Akram Al-Ahmad. Au delà du désastre, penser et agir avec les démocrates syriens.

PARIS, 17 mars à 19H00: Réunion publique avec Akram Al-Ahmad à la Maison Verte (XVIIIème).

BORDEAUX, 17 mars: Conférence publique avec Younès Shasho et Rim Ahmad.

RENNES, 18 mars à 16H30: Réunion publique avec Akram Al-Ahmad.

LYON, 23 mars: Conférence-témoignage avec Akram Al-Ahmad et Rim Ahmad.

MARSEILLE
, 23 mars: conférence -témoignage avec Younès Shasho.

MONTPELLIER, 24  mars: Conférence témoignage avec Akram Al-Ahmad et Rim Ahmad.

LAUSANNE, 28 mars: Conférence témoignage avec Akram Al-Ahmad et Rim Ahmad.

GENÈVE, 29 mars: Conférence témoignage avec Akram Al-Ahmad et Rim Ahmad.

Intervenants

Un long et délicat travail de prise de contacts nous a permis d’identifier, au fil de nombreux échanges des acteurs syriens qui réalisent sur le terrain un travail significatif: deux journalistes, un humanitaire et un avocat: ils ont  une parole essentielle à porter en Europe sur la vie et le travail de la société civile qui continuent malgré tout.  Lire la suite

Le maire d’Alep-Est en conférence à Lyon

Lundi 28 novembre, Brita Hagi Hassan, maire d’Alep-Est, répondra aux questions du public à la Mairie du 1er arrondissement de Lyon, à 18h30. Deux journalistes syriens participeront à la conférence en direct depuis la ville assiégée.

Lien vers l’évènement Facebook

Monsieur Brita Hagi Hassan en visite en France est notre invité exceptionnel.
Il vient parler au public lyonnais du travail du Conseil Local de la Ville d’Alep (CLVA) dont il a été élu Président (ce qui correspond au statut de nos maires) en décembre 2015.

Interviendront également au cours de cette soirée deux journalistes activistes par skype en direct d’Alep assiégée pour répondre aux questions du public: Thaer Mohammed journaliste free lance pour AFP et Mohamed Sphip, journaliste à HNN (media basé à Alep).

Le CLVA ainsi que le Conseil du Gouvernorat d’Alep ont été créés en mars 2013 pour assurer une continuité des services publics après le retrait du régime en juillet 2012.
Monsieur Hagi Hasan vit actuellement dans la région d’Idleb (à l’ouest d’Alep) après s’être retrouvé dans l’impossibilité de regagner Alep après une réunion de travail en Turquie au moment où le siège s’est refermé sur la ville en septembre 2016 .

Cette soirée est organisée par le Collectif des Amis d’Alep en partenariat avec le Comité d’Information pour une Syrie Libre et Démocratique avec le soutient de la Mairie du 1er arrondissement.

Entrée libre

18:30 : Salle du Conseil de la Mairie du 1er
place Satonnay
Métro Hôtel de Ville

A Alep, «ça fait du bien de revoir le jour»

La trève se termine ce soir à minuit. Paris reçoit ce lundi les ministres des Affaires étrangères d’une dizaine de pays, dont le Royaume-Uni, la Turquie, le Qatar, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis pour tenter d’obtenir un prolongement de la trêve.

Par Hala Kodmani Libération 8 mai 2016, extrait:

[…] Et puis ça fait du bien de revoir le jour, le ciel clair et de parler aux gens», dit la mère d’une famille de quatre enfants âgés de 7 à 13 ans. Ceux-ci sont retournés à l’école à la faveur de la nouvelle trêve, après des semaines d’interruption. «Ils sont à l’abri dans les salles de cours en sous-sol et il faut qu’ils rattrapent autant de jours de scolarité que possible, même si je n’ai pas arrêté de les faire lire et écrire à la maison pendant les bombardements, explique l’ancienne institutrice. Je n’ai pas le droit de me plaindre, et je remercie Dieu que mes trois fils et ma fille soient sains et saufs alors que je vois des mères qui ont eu des enfants tués ou gravement handicapés.»

Retour à Alep et Gaziantep.

Nos courageux amis journalistes repartent un à un à Gazientep, puis à Alep, souhaitons leur toute la force et la foi dont ils ont besoin pour continuer leur mission d’informer le monde du malheur qui frappe leurs compatriotes mais aussi de l’incroyable résilience dont ceux ci sont capables! Cette tournée dense et riche de rencontres multiples et variées aura permis nous l’espérons l’engagement de relations pérennes pour soutenir les journalistes et plus globalement la société civile dans ses actions en faisant avancer la cause au-près des pouvoirs publics et des décideurs français, belges et suisses.

Reem Fadel: journaliste pour la chaîne Orient News.

ReemFadel

Lorsque la révolution éclate, Reem Fadel, titulaire d’un diplôme de troisième cycle en littérature arabe, poursuit des études d’arts dramatiques tout en enseignant l’arabe à l’Université d’Alep. Elle participe aux premières manifestations et lorsqu’en 2012 la ville est séparée en deux, son quartier se retrouve dans la zone sous contrôle du régime [Assad].

Bravant le danger, elle se rend régulièrement aux manifestations dans la partie libérée de la ville (Alep Est) et fait le choix de publier ses articles sur sa page Facebook sous son vrai nom. Reem aide  aussi des femmes en difficulté à monter de petits ateliers de couture et à commercialiser leur production, et fournit des manuels scolaires à des enfants déscolarisés suite aux bombardements ou à la réquisition de leur école. Toutes ces activités étant considérées comme des entreprises terroristes par le régime, elle est arrêtée et torturée de décembre 2013 à février 2014.

Reem Fadel a beaucoup publié sur la révolution syrienne, les manifestations à Alep et sur la situation des civils. Elle a finalement décidé de quitter Alep et la Syrie fin 2015 avec ses parents âgés pour les mettre à l’abri des persécutions du régime. Elle exerce actuellement le métier de journaliste à Orient News, à Istanbul.

Louai Abo Aljoud : directeur de l’Agence de presse Pro-Media.

LouaiAboAlJoudEn 2011, alors étudiant en biologie à Alep, il participe aux premières manifestations, se fait arrêter et subit la torture dans les prisons du régime Assad.

A l’été 2012, il filme la prise d’Alep par Armée Syrienne Libre; et suit des stages de formation au journalisme auprès du «London Center for Media Strategies» en Turquie.

Quand Daesh fait son apparition dans la région d’Alep et commence à opprimer tout organe de presse, il est menacé de mort et retenu six mois par le groupe terroriste. Il est libéré à la faveur de négociations menées par la rébellion.

Louai Abo Aljoud a fondé son agence de presse Pro-Media à Gazientep (Turquie), en 2014 et a procuré plusieurs reportages à différentes chaînes de télévision dont Al-Arabiya.